Communiqué
« La République ne tolèrera pas que la crise serve de prétexte au rejet, à la discrimination ou à la haine raciale. Le Gouvernement que je dirige condamne avec une entière fermeté toute démarche visant à faire des immigrés, légaux ou illégaux, les boucs émissaires de difficultés économiques dont ils sont si souvent les premières victimes. » » En réponse à l’envoi du premier volume de Cette France-là, François Fillon se voulait rassurant dans un courrier reçu le 20 mars 2009.
Le deuxième volume de ces annales de la politique d’immigration menée sous la présidence de Nicolas Sarkozy s’emploie à confronter l’engagement du premier ministre aux actes de son gouvernement. Or les résultats de l’enquête sont inquiétants. Car si le chef de l’État a d’abord tenté de faire face à la récession annoncée en promettant une moralisation du capitalisme financier et l’avènement d’une croissance « verte » qui n’oublierait pas l’emploi, son incapacité à tenir de telles promesses l’a bientôt convaincu de revenir sur ses terrains d’élection : la lutte contre l’immigration « subie » et le traitement des troubles identitaires censément éprouvés par les Français.
Deuxième ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, Éric Besson a sans doute soutenu que la maîtrise des flux migratoires et l’exaltation de l’identité nationale étaient les meilleurs remparts contre la xénophobie. Reste que son zèle a révélé l’absence de projet économique, social et écologique qu’il avait vocation à masquer. La défaite de la majorité présidentielle aux élections régionales annonce-t-elle un changement de cap ? À défaut d’alternative, elle risque plutôt de se traduire par une fuite en avant.
C’est à l’analyse de ce contexte qu’est consacré le deuxième volume de Cette France-là. À nouveau, les auteurs de cet ouvrage collectif se fixent trois objectifs.
À travers une centaine de « récits » – portraits de sans-papiers d’un côté, de préfets de l’autre – il s’agit d’abord d’illustrer les effets produits par la politique française d’immigration tant sur les étrangers qui la subissent que sur les principaux responsables de sa mise en œuvre.
Ensuite, les « descriptions » qui composent la deuxième partie de l’ouvrage s’attachent d’une part à rendre compte du renforcement de la suspicion systématique qui entoure l’immigration familiale et les demandeurs d’asile, et d’autre part à rapporter le renouvellement des pratiques gouvernementales et de leurs justifications à la convergence croissante des politiques européennes en matière d’immigration.
Enfin, les « interrogations » sur lesquelles s’achève le deuxième volume de Cette France-là portent d’abord sur les raisons qui ont amené les gouvernements européens à élever l’immigration au rang de problème prioritaire, et ensuite sur la manière dont ils sont parvenus à légitimer une politique dont le ressort est la constitution d’une minorité fragile en objet de préoccupation phobique.
Il convient aujourd’hui de prendre au sérieux la « culture du résultat » dont se réclame Nicolas Sarkozy, et de soumettre à l’évaluation la politique menée par le ministre qui était naguère chargé d’évaluer ses collègues du gouvernement. Avec son volume annuel, Cette France-là entend poser la première pierre d’un audit de la politique d’immigration, impliquant des élus de la nation. Ce travail appelle en effet à s’interroger : le « problème », aujourd’hui, n’est-il pas, plutôt que l’immigration, la politique qui constitue celle-ci en problème ?
Cette France-là, 1/7/2008 – 30/6/2009,
volume 2, en librairie le 8 avril 2010
(Distribution La Découverte, 18 euros – www.cettefrancela.net et contact@cettefrancela.net)