Cour de Cassation / Placement des enfants en rétention : Communiqué relatif aux arrêts n° 1308 et 1309 de la Première chambre civile du 10 décembre 2009

Contre l’avis de l’avocat général , la CC désavoue les 2 cours d’appel et dit que les juges ne peuvent " refuser d’appliquer une loi pour des motifs abstraits d’ordre général " ...

Petite ouverture : pour que les JLD puissent autoriser la rétention des enfants , il faudra qu’ils s’assurent "de façon concrète" que cette rétention ne constitue pas un traitement inhumain ou dégradant prohibé par l’article 3 de la CEDH.

Mais combien de JLD s’en assureront ?

Remarque : si la CC argumente sur la CEDH , la CIDE semble bien absente de son raisonnement ...


Voir aussi :

La France enferme des nourrissons, par Jean Matringe et Karine Parrot

 

 


 

COMMUNIQUE

Dans deux arrêts rendus le 10 décembre 2009, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé que le seul fait de placer en rétention administrative un étranger en situation irrégulière accompagné de son enfant mineur ne constituait pas, en soi, un traitement inhumain ou dégradant interdit par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

A la suite du placement en rétention administrative de personnes étrangères ayant fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français, les préfets de l’Ariège et d’Ile-et-Vilaine ont demandé à des juges des libertés et de la détention de prolonger ces mesures de rétention, puis ont formé un recours contre les décisions qui les en ont déboutés.

Pour confirmer les décisions de ces juges, les magistrats délégués des premiers présidents des cours d’appel de Toulouse et de Rennes ont retenu que les personnes retenues étant accompagnées d’enfants en bas âge, leur maintien dans un centre de rétention, même disposant d’un espace aménagé pour les familles, constituait un traitement inhumain au sens de l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et libertés fondamentales en raison, d’une part, des conditions de vie anormales imposées aux enfant après avoir été gardé à vue avec leurs parents, d’autre part, de la grande souffrance morale et psychique infligée à ceux–ci par cet enfermement, souffrance manifestement disproportionnée avec le but poursuivi de les reconduire à la frontière.

Ces décisions sont cassées par la première chambre civile de la Cour de cassation qui considère que ces magistrats se sont prononcés par des motifs impropres à caractériser, dans l’espèce dont ils étaient saisis, un traitement inhumain ou dégradant.

Ces arrêts de la Cour de cassation rappellent que l’obligation faite aux juges de veiller au respect par les autorités nationales des dispositions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peut les conduire à refuser d’appliquer une loi pour des motifs abstraits d’ordre général et qu’ils ne peuvent écarter l’application d’une disposition légale qu’après avoir recherché la façon concrète dont elle est mise en œuvre. Aussi, ce n’est que s’il est établi que l’application de la loi en question aux situations de fait dont ils sont saisis serait de nature à constituer une violation de la convention européenne qu’ils doivent en écarter l’application.

Il reviendra donc aux juges des libertés et de la détention saisis d’une demande de prolongation de la rétention administrative de personnes étrangères en situation irrégulière accompagnées de leurs enfants mineurs de vérifier les conditions dans lesquelles ces dernières sont effectivement retenues et ainsi s’assurer de façon concrète que cette rétention ne constitue pas un traitement inhumain ou dégradant prohibé à l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Cet arrêt a été rendu sur avis non conforme de l’avocat général, lequel a estimé que le fait de placer en rétention administrative un étranger en situation irrégulière accompagné de son enfant mineur devait rester une mesure exceptionnelle, les circonstances de faits comme le très jeune âge de l’enfant suffisant à caractériser en l’espèce une violation de l’article 3 de la norme européenne.

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