Monsieur le Préfet,
Comment mes enfants vont-ils poursuivre leur scolarité ?
Où allons-nous dormir ce soir ?
Si mon bébé est malade comment vais-je faire pour le soigner ?
Qu’allons-nous manger aujourd’hui ?
sont autant de questions qui viennent s’ajouter au quotidien déjà bien compliqué des familles suite à leur mise à la rue sur « injonction préfectorale » (dixit le SIAO) juste avant les vacances scolaires.
Dans ce cadre, Monsieur le Préfet, nous souhaitons intervenir sur la situation de l’hébergement pour vous faire part des profondes inquiétudes de nos adhérents face aux directives qui ont été données par les services de l’Etat et, tout particulièrement, en ce qui concerne les nuitées hôtelières et l’hébergement d’urgence. Ces inquiétudes sont partagées par les adhérents de nombreuses associations signataires et par des citoyennes et citoyens qui se sont fortement exprimés lors d’une rencontre le 26 juillet dernier.
En effet, à Lorient, le SIAO nous a indiqué qu’il leur était demandé de faire sortir des dispositifs d’hébergement un nombre important de personnes en réduisant drastiquement le nombre de places d’accueil.
Sur ce point, nous souhaitons alerter que cette décision est contraire aux dispositions du code de l’action sociale et des familles et notamment au principe d’inconditionnalité de l’hébergement d’urgence (art L 345-2-2 du CASF).
La réalité de ces injonctions préfectorales ce sont des remises à la rue sans alternative de personnes et de familles ayant de jeunes, voire très jeunes, enfants dans un contexte déjà très fortement tendu (interdiction de travailler, complexité et longueur des procédures, mise en procédure Dublin parfois avec obligation de signer plusieurs fois par semaine à plus de 60 kilomètres, restriction d’accès à l’aide sociale…). De fait ces familles subissent des situations déshumanisantes, inhumaines et inextricables comme en témoignent les bénévoles et les salariés de nos associations qui les accompagnent au quotidien.
Cette réalité de terrain, Monsieur Le Préfet, est insupportable, accentue les atteintes à la dignité des personnes, à la tranquillité publique (car c’est aussi une question d’ordre public) et impacte notre conception française et républicaine du Vivre Ensemble. Très clairement elle est fondamentalement en opposition avec les valeurs humanistes et les principes qui fondent nos associations et nous semble-t-il en contradiction avec les textes ratifiés par l’Etat français : Convention des Droits de l’Homme, Convention Internationale des Droits de L’Enfant et Convention de Genève.
Sur ces sujets, nos associations sont engagées ou prêtes à s’engager dans l’action aux côtés des pouvoirs publics. Elles ne se considèrent pas comme de simples sous-traitantes mais se veulent de véritables partenaires à part entière.
C’est une question de fond et de méthode. Sur la méthode, il y a des marges de progrès importantes en matière de concertation. Nos associations ont besoin de prévisibilité, de dialogue et de continuité de l’action.
C’est véritablement un signal d’alarme que nous tirons aujourd’hui, même si cela n’enlève rien à notre détermination à continuer à œuvrer pour l’accueil, l’accompagnement et l’insertion de toutes les personnes en situation de précarité. En tout état de cause, nous appelons à un minimum d’humanité et une prise en compte des textes ratifiés par la France pour qu’aucun enfant, mineur isolé ou en famille, ne soit laissé à la rue, quelle que soit leur situation administrative.
Nous souhaitons donc, Monsieur le Préfet, pouvoir en échanger avec vous afin de construire ensemble les modalités qui permettront de trouver l’issue à cette situation.
Dans l’attende de votre réponse, veuillez agréer, Monsieur le Préfet, nos sincères salutations.
Signataires :
Accueil Sans Frontière, Béthanie, Breizh Care,
CADPL (Collectif d’Accueil en Pays de Lorient), Centre Social de Keryado,
Centre Social du Bois du Château, CIMADE Lorient, CIMADE Vannes,
CRPA (Conseil Régional des Personnes Accueillies), DAL (Droit au logement), Entraide Protestante, FAS (Fonds d’Action Sociale), FCPE (Fédération des Conseils de Parents d’Elèves), Fédération des Centres Sociaux & Socioculturels de Bretagne, IQRAA 56, JVD (J’ai vu un documentaire), Le Chainon, Ligue des Droits de l’Homme, Maison pour Tous de Kervénanec, Pays de Lorient en Transition, Queer asso, RESF (Réseau Education Sans Frontières), Secours Catholique, Secours Populaire, Solidarité Exilés Hennebont, UTOPIA 56
Copies envoyées aux Député.es du Morbihan, Député.es Européens Bretons, Sénatrices et Sénateurs du Morbihan, Candidates et candidats aux sénatoriales.