973 - Guyane

Lettre ouverte au préfet de Guyane

Cayenne, le 13 mars 2022.

À Monsieur le Préfet de la Guyane.

Objet : Entrave au droit des étrangers, non respect de la Charte Marianne
Refus de guichet pour les dépôts de dossier de demande de carte de séjour
Monsieur le Préfet de Guyane,

Le Réseau Education Sans Frontières Guyane qui se compose de nombreux syndicats
enseignants (SNUipp-FSU, SNES-FSU, SUD Education Guyane...), de citoyen-ne-s, de juristes et d’avocat-e-s, d’associations (CIMADE, COMEDE, LDH, VIVA...) , de personnels de l’éducation, de travailleur-se-s sociaux-ales, de lycéen-ne-s et d’étudiant-e-s ainsi que de partis politiques, souhaite faire la lumière sur les comportements inacceptables au sein de la préfecture de Guyane.

Face aux usagers de nationalité étrangère et en particulier face aux lycéens et étudiants qui entament des démarches pour régulariser leur situation administrative, l’attitude des agents de votre administration est intolérable.

Nous souhaitons à travers ce courrier, au nom de l’État de droit, que vous remédiez aux
dysfonctionnements qui deviennent la règle au service étranger, tel que vous vous y êtes engagé.

En effet, voici plus d’un an que nous vous avons rencontré, le 19 février 2021, pour évoquer
le sort des lycéens et étudiants étrangers, des rapports entre agents et administré-e-s. Vous nous avez assuré de l’intérêt que vous portiez à la Charte Marianne, à la formation des personnels qui accueillent le public et surtout au respect de la loi.

Depuis ce rendez-vous nous avons contacté à plusieurs reprises les sous-préfets, le directeur général de la sécurité, de la réglementation et des contrôles ainsi que le directeur de l’immigration pour les alerter sur les retours que nous faisaient les jeunes, suite aux rares obtentions de rendez- vous pour déposer une demande de carte de séjour
Nous avons fait remonter des exemples de rendez-vous qui se sont soldés par des refus de dépôts alors que les dossiers étaient complets. Nos bénévoles ont pu vérifier par elleux-même la complétude des dossiers.

Des agents se permettent de donner de faux prétextes aux jeunes majeurs pour leur expliquer qu’ils ne déposeront pas leur demande de carte de séjour. Ainsi, à la préfecture, ces derniers peuvent s’entendent dire qu’ils et elles n’ont « qu’à faire un enfant avec un français ! », que si leurs parents sont en situation régulière en France, « ça ne compte pas, il faut qu’ils vivent en Guyane. », ou encore qu’ils et elles ne peuvent pas déposer leur demande s’ils et elles n’ont pas « 10 ans de présence sur le territoire

Vous savez pertinemment que les arguments opposés par vos agents ne sont pas légaux. Les agents n’ont pas à décider de l’acceptation ou non d’un dossier s’ils n’ont pas délégation de votre signature. Leur mission se borne à la vérification de la complétude des dossiers. Seulement cela.

Monsieur le Préfet, au-delà de l’accueil et des exemples d’agents qui déchirent un récépissé devant un jeune, d’agents qui leur parlent avec condescendance et les renvoient sans aucune forme, l’absence d’accompagnateur-rice ne permet pas de témoins. Impossible pour les jeunes de faire valoir leur droit

Monsieur le Préfet, la situation est grave et votre inaction insupportable. Doit-on supposer
une stratégie cynique de votre part ? Car les jeunes lycéens et étudiants que nous accompagnons font des demandes de carte de séjour que peut-être, vous serez amené à refuser. Dans ce cas, ils ont besoin d’un refus en bon et due forme pour pouvoir faire un recours au tribunal administratif. Sans dépôt, pas de refus. Sans refus, pas de recours. Sans recours, pas de carte de séjour.
Nombreux et nombreuses sont celleux qui obtiendraient une carte de séjour au vu de leur dossier, mais ils et elles n’ont pas pu et ne peuvent toujours pas déposer leur demande.
Des jeunes n’accèdent pas à leurs études supérieures, ne peuvent être embauché-e-s ou suivre un apprentissage du fait de la situation actuelle dans vos services. Peut-on décemment laisser de jeunes êtres humains dans cette détresse, en les laissant indéfiniment sans perspectives d’avenir ?

Nous attendons donc de votre part, que les administré-e-s dont le devoir est de faire
régulariser leur situation puissent accéder aux droits qui sont les leurs dès aujourd’hui.

Nous vous prions de croire, Monsieur le Préfet, en l’assurance de nos respectueuses
salutations.

Le Réseau Éducation Sans Frontière Guyane

(Voir en PJ la lettre en pdf)