C. n° 2002-063 du 20-3-2002
NOR : MENEO200681C
RLR : 515-0
MEN - DESCO B6 - DAJ A1
Texte adressé aux rectrices et recteurs d’académie ; aux inspectrices et inspecteurs d’académie, directrices et directeurs des services départementaux de l’éducation nationale ; aux chefs d’établissement
oL’objet de la présente circulaire est de reconsidérer et de préciser les modalités d’inscription et de scolarisation des élèves de nationalité étrangère du premier et du second degrés en prenant en compte les évolutions législatives et réglementaires intervenues depuis la circulaire du 16 juillet 1984.
En l’état actuel de la législation aucune distinction ne peut être faite entre élèves de nationalité française et de nationalité étrangère pour l’accès au service public de l’éducation. Rappelons, en effet, que l’instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, âgés entre six et seize ans, qu’ils soient français ou étrangers, dès l’instant où ils résident sur le territoire français. Les personnes responsables, au sens de l’article L.131-4 du code de l’éducation, d’un enfant de nationalité étrangère soumis à l’obligation scolaire, sont donc tenues de prendre les dispositions prévues par la loi pour assurer cette instruction. En outre, la convention internationale relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989, ratifiée par la France, garantit à l’enfant le droit à l’éducation en dehors de toute distinction qui tienne à sa nationalité ou à sa situation personnelle.
I - Inscriptions scolaires
Il importe, au préalable, de préciser qu’en l’absence de toute compétence conférée par le législateur, il n’appartient pas au ministère de l’éducation nationale de contrôler la régularité de la situation des élèves étrangers et de leurs parents au regard des règles régissant leur entrée et leur séjour en France. Il est précisé, en outre, que la loi n° 89-548 du 2 août 1989 a reporté de seize à dix-huit ans l’âge de détention obligatoire d’une carte de séjour temporaire ou d’une carte de résident. Enfin, pour les jeunes de plus de dix-huit ans, le conseil d’État, dans une décision du 24 janvier 1996, a considéré que les dispositions de l’article 12 de l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 subordonnant la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" à la preuve que l’intéressé suit un enseignement en France "impliquent nécessairement qu’un étranger venu en France comme étudiant puisse être admis, au moins à titre provisoire, dans un établissement d’enseignement avant d’avoir obtenu un premier titre de séjour".
En conséquence, l’inscription, dans un établissement scolaire, d’un élève de nationalité étrangère, quel que soit son âge, ne peut être subordonnée à la présentation d’un titre de séjour. Les dispositions ci-après ont simplement pour objet d’apporter certaines précisions sur les conditions d’inscription des élèves étrangers dans les établissements scolaires.
1) Dans le second degré
Pour un jeune de moins de seize ans séjournant en France, sans ses parents mais avec une personne qui déclare en avoir la responsabilité, et à ce titre demande son inscription dans un établissement scolaire, il y a lieu de vérifier la situation de cette personne par rapport à l’enfant. Celle-ci peut reposer sur un fondement juridique : tutelle ou délégation d’autorité parentale ; dans ce dernier cas, l’attestation sur le droit de l’acte de délégation de l’autorité parentale est établie par les services consulaires en France du pays dont le jeune étranger est ressortissant. Toutefois, les dispositions législatives relatives à l’obligation scolaire imposent à toute personne exerçant une simple autorité de fait sur un enfant la charge d’assurer son instruction (article L.131-4 du code de l’éducation). Dans ce cas la preuve que l’enfant est régulièrement confié à cette personne peut être effectuée par tout moyen (lettre des parents, notoriété publique...). L’inscription dans un établissement scolaire ne peut donc être subordonnée à la présentation par la personne qui inscrit l’enfant d’un acte de délégation de l’autorité parentale. Si l’enfant se présente seul et, d’une manière générale, en cas de présomption d’enfant en danger, il conviendra de procéder à un signalement selon les procédures en vigueur (cf. titre II de la circulaire n° 97-119 du 15 mai 1997).
Pour les mineurs étrangers de seize ans à dix-huit ans, même s’ils ne sont pas soumis à l’obligation scolaire, il y a lieu de veiller à ce que leur scolarisation puisse être assurée, en prenant en compte naturellement leur degré de maîtrise de la langue française et leur niveau scolaire. La vérification de leur situation familiale et sociale peut être effectuée dans les conditions prévues au paragraphe précédent.
Il est précisé que le refus de scolariser un jeune qui n’est plus soumis à l’obligation scolaire doit être motivé (arrêt de section du Conseil d’État du 23 octobre 1987 consorts Métrat). Ce refus peut être justifié par un motif pédagogique.
2) Dans le premier degré
Les dispositions législatives relatives à l’obligation scolaire (livre I, titre III, chapitre 1er du code de l’éducation) sont les mêmes que pour le second degré. En conséquence, les dispositions du premier paragraphe du titre I-1 ci-dessus sont également applicables à l’enseignement du premier degré. Toutefois, il appartient au maire, comme pour les enfants français, de délivrer le certificat d’inscription au vu duquel le directeur de l’école procède à l’admission de l’enfant.
II - Scolarisation des élèves de nationalité étrangère
Ces élèves ont les mêmes droits à être instruits que les élèves de nationalité française. Toutefois, des difficultés particulières peuvent être rencontrées, notamment lorsque ces élèves ne sont pas en situation régulière au regard des lois relatives à l’immigration. Plusieurs situations justifient des précisions complémentaires :
1) La poursuite d’études
Les dispositions du titre premier du code de l’éducation relatives au droit à l’éducation sont applicables aux élèves de nationalité étrangère comme aux élèves français. Il en est ainsi de l’alinéa 1 de l’article L. 111-2 qui dispose que "tout enfant a droit à une formation scolaire, qui, complétant l’action de la famille concourt à son éducation" et de l’article L. 122-2 qui prévoit que "tout élève qui, à l’issue de la scolarité obligatoire, n’a pas atteint un niveau de formation reconnu doit pouvoir poursuivre des études afin d’atteindre un tel niveau". Par ailleurs, l’article L.131-4 dont le premier alinéa pose le principe de l’obligation scolaire de 6 à 16 ans, dispose, dans son 2ème alinéa que "la présente disposition ne fait pas obstacle à l’application de prescriptions particulières imposant une scolarité plus longue".
À cet égard, doivent être notamment rappelées les dispositions de l’article 19 du décret n° 90-484 du 14 juin 1990 relatif à l’orientation et à l’affectation des élèves ; elles s’appliquent à tous les jeunes scolarisés : "Tout élève admis dans un cycle de formation doit pouvoir parcourir la totalité de ce cycle dans l’établissement scolaire, sous réserve des dispositions réglementaires relatives aux procédures disciplinaires".
En conséquence, les élèves de nationalité étrangère doivent pouvoir, comme les élèves de nationalité française, poursuivre des études engagées. Toutefois, la poursuite d’études ne confère pas aux jeunes étrangers de plus de 18 ans, ressortissants d’un État tiers à l’Union européenne et à l’Espace économique européen, un droit au séjour sur le territoire français. Seuls, en effet, les étrangers ressortissants d’un État membre de l’Union européenne et de l’Espace économique européen peuvent se prévaloir d’un droit au séjour sur le fondement de la poursuite d’études.
2) Les examens
Un jeune étranger scolarisé a le droit de s’inscrire à un examen.
Certains candidats étrangers peuvent cependant ne pas être en mesure d’obtenir une pièce d’identité. Etant scolarisés, ils devront au moins présenter un certificat de scolarité très récent, avec une photographie, certifiée par le chef d’établissement d’origine.
3) Les stages en entreprises
Les services de l’éducation nationale ont été à plusieurs reprises confrontés à des difficultés pour permettre aux jeunes de nationalité étrangère d’effectuer des stages en entreprise. Ces difficultés sont souvent liées à une confusion entre la situation des jeunes sous statut scolaire qui doivent, dans le cadre de leur scolarité, effectuer une période de formation en entreprise et celle des jeunes, titulaires d’un contrat d’apprentissage passé avec une entreprise. Il convient donc de bien distinguer ces deux situations :
a) Sous statut scolaire
Lorsqu’ils sont sous statut scolaire, les élèves mineurs de nationalité étrangère quelle que soit leur situation administrative au regard du séjour, doivent effectuer les stages et les périodes de formation prévus dans les programmes d’enseignement. L’entreprise n’a pas à contrôler la régularité de leur situation.
Pour les élèves majeurs, le chef d’entreprise est en droit de demander un titre de séjour régulier. Il est précisé à cet égard que la carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" permet à son détenteur de suivre un enseignement en alternance dans la cadre d’une convention de stage entre l’établissement d’enseignement et le jeune.
Les modalités de la présence de l’élève, mineur ou majeur, dans l’entreprise d’accueil sont fixées par cette convention de stage.
Étant sous statut scolaire :
- l’élève bénéficie des dispositions de la législation sur les accidents du travail (article L. 412-8 du code du travail) pour les dommages qu’il subirait dans le cadre du stage ;
- l’élève stagiaire, qu’il soit de l’enseignement général ou professionnel, continue de relever, pendant la durée du stage, de l’autorité et de la responsabilité du chef d’établissement, ainsi que le rappelle, pour les élèves de l’enseignement professionnel, la note de service n° 96-241 du 15 octobre 1996 relative à une convention-type sur la formation en milieu professionnel des élèves de lycées professionnels ;
- l’élève stagiaire ne peut prétendre à aucune rémunération, en vertu de l’article D. 412-6 du code de la sécurité sociale, mais à une rétribution d’un montant égal ou inférieur à 30 % du SMIC.
b) Sous contrat d’apprentissage
Le contrat d’apprentissage relève des dispositions du code du travail.
En effet, l’article L. 117-1 du code du travail définit le contrat d’apprentissage comme étant "... un contrat de type particulier par lequel un employeur s’engage, outre le versement d’un salaire, à assurer à un jeune travailleur une formation professionnelle méthodique et complète, dispensée pour partie en entreprise et pour partie au centre de formation d’apprenti...".
De ce fait, il résulte de la combinaison des dispositions de l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France (articles 9, 12 bis et 15) et des dispositions du code du travail (notamment articles L. 341-4 et R. 341-4) que l’apprenti étranger, ressortissant d’un État tiers à l’Union européenne et à l’Espace économique européen, doit, pour bénéficier d’un tel contrat, être en situation régulière au regard du séjour et titulaire d’une autorisation de travail.
En revanche, l’accès à un contrat d’apprentissage par un ressortissant d’un État membre de l’Union européenne et de l’Espace économique européen n’est pas subordonné à la présentation préalable d’un titre de séjour.
4) Les voyages à l’étranger
En cas de voyage à l’étranger, il y a lieu de respecter très attentivement les formalités préalables, afin d’éviter des difficultés au moment du passage de la frontière. Il convient en particulier de s’assurer avant le départ que l’on est en possession des documents nécessaires pour permettre à tous les élèves de franchir les différentes étapes du voyage (entrée dans le pays de destination, passage par les pays de transit, retour en France).
Le tableau ci-dessous fait le point sur les documents requis, dans le cadre de la réglementation actuelle, en matière de circulation transfrontalière et de séjour à l’étranger des élèves mineurs, en fonction, d’une part, de leur nationalité (ressortissants ou non d’un pays de l’union européenne) et, d’autre part, des pays de destination.
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| Avec les élèves mineurs |
... d’un État membre de l’Union européenne |
... d’un État tiers à l’Union européenne |
| ... ressortissants d’un autre État de l’Union européenne |
• accord exprès d’un détenteur de l’autorité parentale ; la préfecture n’a pas compétence pour viser lasortie du territoire français d’unmineur étranger.
• un titre certifiant l’identité du mineur (carte d’identité ou passeport en cours de validité).Cette obligation demeure malgréla libre circulation des personnes. |
• accord exprès d’un détenteur de l’autorité parentale ; la préfecture n’a pas compétence pour viser la sortie du territoire français d’un mineur étranger.
• un titre certifiant l’identité dumineur (carte d’identité oupasseport en cours de validité) ;se renseigner auprès du consulatdu pays de destination des exigences d’entrée et séjour pour la nationalité considérée (visa). |
| ... ressortissants d’un État tiers à l’Union européenne(réf. : décision du Conseilde l’Union européennedu 30 novembre 1994). |
• accord exprès d’un détenteur del’autorité parentale ; la préfecturen’a pas compétence pour viser lasortie du territoire français d’unmineur étranger.
• un titre d’identité ou de voyage au nom du mineur :
- soit un passeport en cours de validité (ou, le cas échéant, un titre de voyage pour réfugié et apatride délivré par la préfecture*) accompagné :. d’un document de circulation pour étranger mineur délivré par la préfecture ;
. ou d’un titre d’identité républicaindélivré par la préfecture ;
. ou d’un visa préfectoral de retour (un visa d’entrée peut être exigé par le pays de destination) ;
- soit une liste collective établie par la préfecture valant document de voyage et visa d’entrée (elle concerne tous les élèves) ; cette liste n’est pas valable pour les voyages à destination de la Grande-Bretagne ou de l’Irlande. |
• accord exprès d’un détenteur del’autorité parentale ; la préfecturen’a pas compétence pour viser lasortie du territoire français d’unmineur étranger.
• un titre d’identité ou de voyageau nom du mineur : Passeport en cours de validité (ou, le cas échéant, un titre devoyage pour réfugié et apatridedélivré par la préfecture*),accompagné :
- soit d’un document de circulation pour étranger mineur délivré par la préfecture ;
- soit d’un titre d’identité répu-blicain délivré par la préfecture ;
- soit d’un visa préfectoral de retour.
Se renseigner auprès du consulat du pays de destination des exigences d’entrée et séjourpour la nationalité considérée(visa). |
* Ce document ne permet pas à son titulaire de séjourner dans le pays dont il est originaire.
La circulaire n° 84-246 du 16 juillet 1984 relative aux modalités d’inscription des élèves étrangers dans l’enseignement du premier et du second degrés est abrogée.
Pour le ministre de l’éducation nationale
et par délégation,
Le directeur du Cabinet
Christian FORESTIER