infos-chalon.com

"On a fait de nous des immigrés", Giuseppe Mungo

Giuseppe Mungo, écrivain chalonnais édite aux Editions de l’Harmattan dans la collection Graveurs de Mémoire son dernier ouvrage, un témoignage poignant sur la condition d’un Français immigré, arrivé en France après un exil du sud de l’Italie pour échapper à la misère quotidienne. Il évoque sans détours la souffrance physique et psychique de son exil. L’auteur qui vit à Chalon sera invité à la Fête du livre d’Autun qui se tient à la fin du mois d’avril. Un ouvrage à découvrir.




AFFICHEMUNGO.jpg


Préface


Le récit de Giuseppe Mungo est un cri de révolte, celui d’un arrachement. Adieu à toi mon Sud où la lumière transforme la misère en une beauté minérale, qu’aucune injustice ne parviendra jamais à corrompre.

L’exil commence en Sardaigne où le père doit passer sous les fourches caudines d’un ordre établi immuable pour trouver du travail où tout est dû au notable local qui se fait appeler « le don » ; même l’eau de son puits est monnayée chichement lorsque la fontaine publique se tarit.

Le jeune Giuseppe a une conscience aiguë de cette injustice, sa curiosité, sa précocité intellectuelle lui font vite comprendre l’imposture des jeux politiques et des slogans qu’on jette en pâture au peuple afin d’obtenir sa voix. Il est rebelle à tout embrigadement : « je dénonce, donc je suis » nous dit-il. Mais sa révolte est celle d’un humaniste et d’un poète. Nulle haine dans ses propos, seulement le désir de comprendre et de se construire avec cette capacité d’aimer, de ressentir qu’aucune frustration ne peut l’altérer.

L’immigration en terre étrangère survient au seuil de l’adolescence au terme d’un long et pénible voyage. Le voilà dans un autre monde, en Bourgogne où le ciel est gris, les pâturages verts toute l’année, la terre grasse, ce qui ne cessera d’étonner son père habitué à travailler une terre aride et pauvre.

Une autre langue, d’autres règles parfois aussi iniques que celles de son pays, l’école de la République à laquelle l’auteur rend un hommage sobre et émouvant. Ce n’est plus un Italien du Sud mais un Français devenu ouvrier qualifié dans un grand groupe industriel avec le beau parcours que l’on connaît. Un Français immigré qui ne peut oublier ses racines, son Sud. Le récit du retour est poignant de beauté, d’émotion, de révolte aussi. La conversation engagée avec un Italien du Nord dans le train qui le ramène en terre natale n’est pas que le fruit du hasard, c’est aussi par besoin, pour se libérer de la souffrance d’avoir été considéré comme un étranger dans son propre pays. Et puis cette angoisse du retour, « ce Sud retrouvé comme une fiancée qu’on a quittée sans se retourner, vais-je vraiment l’aimer, m’acceptera-t-il ? »

On lit ce livre d’une traite, transporté par la sensibilité poétique de son auteur, bouleversé par cette histoire familiale qui nous renvoie à la condition de tous les immigrés, ému par l’hommage qui est fait aux vertus républicaines de notre pays.



Docteur Yves GEY

 

Lire la suite : http://www.infos-chalon.com/article...