91 - Essonne

Yoro doit revenir en France !

Monsieur le Préfet de l’Essonne,

Vous avez placé le jeune Yoro Soumaré en centre de rétention le 11 février 2020 et vous avez fait procéder à son expulsion au Mali le 3 mars 2020, pays qu’il a quitté depuis 2011, et où il n’a plus aucune attache.

Les épreuves que Yoro a subies ont été si difficiles qu’il en a gardé un traumatisme profond et durable. Son père est décédé quand il avait 8 ans. Son oncle paternel s’est alors octroyé immédiatement la maison familiale ainsi que la mère de Yoro, et a chassé tous les enfants. Yoro garde encore sur le corps de profondes traces des sévices infligés par l’oncle. Yoro a alors été un enfant des rues, devant travailler pour survivre. Il s’est retrouvé complètement seul, ses frères étant partis sans laisser de traces vers d’autres pays d’Afrique. Yoro a patiemment économisé pour pouvoir quitter l’Afrique et espérer une vie meilleure. Il a pu ainsi, à l’âge de 16 ans, traverser les déserts malien et marocain. Il a encore travaillé très durement, comme homme à tout faire au Maroc, pour pouvoir prendre un petit bateau gonflable pour rejoindre l’Espagne. La traversée a été terrible et Yoro garde le cauchemar des personnes qui se noyaient autour de lui.

Quand il est finalement arrivé en France en août 2012, Yoro a été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance. Etant donné sa grande fragilité due à ses traumatismes, une association le prend encore en charge actuellement pour l’hébergement. A son arrivée en France, Yoro ne savait ni lire ni écrire, il avait tout à apprendre et il a fait des efforts colossaux pour rattraper son retard. En 2016, il a réussi à intégrer un CAP cuisine en alternance, ce qui lui a permis d’avoir un titre de séjour étudiant. Il a malheureusement dû quitter ce CAP, son employeur se comportant incorrectement avec lui en le faisant travailler un nombre d’heures abusif. Malgré cet échec, Yoro Soumaré a continué avec ténacité à se former. Il a fait ainsi plusieurs formations, notamment de préparateur de commande et de cariste, ce qui lui a permis d’exercer une activité rémunérée. Il a ensuite travaillé sur des chantiers comme manœuvre. Une demande de régularisation a alors été faite à la Préfecture de l’Essonne en juin 2019, mais celle-ci n’avait pas encore abouti début février : l’employeur de Yoro, bien que le faisant travailler dur, refusait de fournir les documents nécessaires à la régularisation.

Yoro était en train de trouver un autre employeur, susceptible de fournir ces documents, quand sa vie s’est arrêtée et qu’il a été placé en centre de rétention en février 2020. A la sortie d’un magasin, Yoro a été trouvé en possession d’un câble de téléphone, qu’il affirme ne pas avoir volé et qu’il a immédiatement payé à la caisse. Le problème semblait réglé mais le contrôle des papiers qui a suivi a entraîné l’arrestation.

Les seules personnes qui ont accueilli Yoro à son arrivée à Bamako sont des membres de l’association des Maliens Expulsés, contactés par le RESF. Monsieur le préfet de l’Essonne, nous vous demandons d’abroger l’interdiction de retour sur le territoire français que vous avez pris à son encontre et de lui permettre de revenir en France où se trouve toute sa vie sociale.